Précédemment, nous avons relevé que la restauration et nos modes de consommation sont affectés par l'impact des plateformes de livraison de repas en ligne. Pourtant, des milliers de personnes sont négligées et victimes de cette influence : les livreurs et livreuses. Nous découvrirons dans cet article, les questions éthiques liées à ces derniers.
Les acteurs et actrices de l’ombre
Les années 2020 et 2021 ont boosté le nombre d’offres d’emplois auprès des plateformes. Uber Eats a par ailleurs doublé son nombre d’employés durant cette période, en atteignant une main-d'œuvre de 30 000 livreurs-euses sur l’ensemble du territoire français.
Les livreurs-euses jouent un rôle crucial en tant qu'intermédiaires entre une enseigne et ses clients. Ils sont principalement chargés de livrer les commandes à leurs destinataires dans les délais impartis. Les plateformes de livraison de repas en ligne ne peuvent pas opérer sans leur participation, le principe même repose sur eux.
D’après l’étude de la revue Les Echos Start, la moyenne d’âge des livreurs et livreuses est de 25 ans. 92% d’entre eux sont des hommes. Les femmes quant à elles ne sont que 8% à exercer ce métier en France.
Un métier accessible aux premiers abords
Devenir livreur ou livreuse sur les plateformes de livraison de repas en ligne est promu comme étant un processus simple et rapide. Les 3 grands monopoles en France promettent un suivi ainsi qu’un panel d’avantages. Les plateformes mettent en avant un salaire attractif, des conditions de métier plutôt agréables, et enfin, un moyen de pouvoir auto-gérer son emploi du temps.
Voici quelques exemples :
Le processus d’inscription reste pratiquement le même. Il faut dans un premier temps se rendre sur leurs pages dédiées. Chacune de ces plateformes met en avant ses atouts ainsi que des conseils ou bien des feedbacks (retours) de professionnels dans le métier depuis de nombreuses années.
Le métier de livreur et livreuse n’exige pas de diplômes particuliers et est ouvert à toute personne âgée de plus de 18 ans. Uber Eats et Deliveroo requièrent dans leur processus d’inscription vos informations personnelles ainsi qu’un statut de travailleur indépendant. Ce statut comprend la création d'une entreprise individuelle ou bien d’une micro-entreprise en France. De ce fait, le ou la candidat-e pourra insérer dans son dossier :
L’extrait KBIS (permet de prouver que votre entreprise est immatriculée au registre du commerce et des sociétés).
Ou bien l’avis de situation au répertoire SIREN (une « fiche d'identité » de votre entreprise associée au numéro siret ou siren).
L’inscription se poursuit en renseignant les informations nécessaires sur le moyen de transport utilisé (voiture, vélo, motocycle, justificatif de permis et assurance).
Selon la plateforme à laquelle vous vous enregistrez, vous devrez vous procurer un sac isotherme aux dimensions recommandées par celle-ci, ainsi qu’un équipement. Par exemple, Uber Eats ne fournit pas ce sac à la différence de son concurrent Deliveroo, qui lui fournit gratuitement tout l'équipement nécessaire.
Une fois le dossier validé, vous n’aurez plus qu'à activer votre compte et entamer cette nouvelle aventure. Mais que réserve-t-elle ?
Types de contrats
Uber Eats et Deliveroo permettent à leurs employés de fonctionner à leur propre rythme et indépendamment.
Il existe cependant une toute autre offre d’engagement auprès de Just Eat.
Cette plateforme favorise les contrats à durée indéterminée (CDI) ainsi que des formations de sécurité. Elle indique que leurs employés seront payés à l’heure qu’ils soient en pleine livraison ou bien en attente d’en trouver une. Elle impose un planning de livraison en raison de la nature du contrat contrairement à ses deux concurrents.
Les conditions de travail
Être livreur ou livreuse, c’est faire face à plusieurs aléas malgré les quelques bénéfices qu’ils pourraient recevoir. Depuis la montée en flèche de la demande sur ces plateformes, ils doivent faire face à de nombreux défis tels que
Des horaires de travail irréguliers
Une santé mise en jeu durant leurs trajets
L’insécurité des livreuses face à des personnes pas commodes ou bien du au fait qu’elles soient seules tard la nuit, sans éclairage.
Circuler selon les conditions météorologiques
Ou bien encore les simples aléas de la vie
La rémunération
La rémunération (dans le cas d’Uber Eats et Deliveroo) est uniquement basée sur le nombre de livraisons effectuées et les pourboires des clients. La notation des profils des livreurs peut influencer le consommateur dans sa gratification. Et les aléas sur les commandes dus aux enseignes peuvent aussi impacter leur salaire : produit manquant, non respect des requêtes du consommateur. Le client non satisfait n’accordera aucun pourboire.
De plus, leur salaire instable est également impacté par les commissions prélevées par les plateformes et s'élèvent entre 25% et 30%.
Des achats externes s’ajoutent à l’addition pour ce (cette) salarié(e). Comme mentionné en début d’article, certaines plateformes ne fournissent pas d’équipements ou de sacs. Uber Eats par exemple, met son sac en vente à 35.39€ si vous n’en avez pas chez vous. Bien que cela semble moindre, ce type d’achat supplémentaire peut s'avérer être un frein économique aux yeux des livreurs et livreuses.
Un ras le bol général
Depuis le 1er Novembre 2023, Uber Eats a décidé de changer son algorithme de rémunération sans aucune consultation auprès de ses salariés. Les rémunérations diminuées et surtaxées sont présentes dans toutes les plateformes dont celle du géant vert.
Les livreurs et livreuses de la plateforme demandent une transparence totale ainsi qu’une revalorisation de leurs salaires (baisse estimée de 10% à 40%), chose non entendue par cette dernière.
Les syndicats appellent ainsi à la grève des coursiers et coursières Uber Eats le 2 et 3 Décembre 2023.
La montée en puissance des plateformes de livraison de repas a mis en évidence le rôle crucial des livreurs et livreuses en tant qu'intermédiaires. Malgré la promotion d'un processus d'inscription simple et rapide, la réalité de ce métier expose les employés à diverses conditions de travail suscitant des préoccupations, en raison des décisions unilatérales prises par les plateformes.
Références utilisées
Revue CHR, Article de blog, “Performances record pour Uber Eats en 2020”, 2021
Performances record pour Uber Eats en 2020 - Au Coeur du CHR
Article du journal Sud Ouest, "Uber Eats : pourquoi les livreurs sont appelés à faire grève les 2 et 3 décembre", 2023
Uber Eats : pourquoi les livreurs sont appelés à faire grève les 2 et 3 décembre (sudouest.fr)
SIMON-RAINAUD, Marion, Article de la revue Les Echos Starts, "6 chiffres pour mieux connaître les livreurs Uber Eats (et leurs conditions de travail)", 2021
GIORDANO, Eva, Article du blog Circonflex Mag, "LE PHÉNOMÈNE UBER EATS : OÙ SONT LES FEMMES ?", 2021
Le phénomène Uber Eats : où sont les femmes ? - Circonflex Mag
Photo de couverture d'article réalisée par Kai Pilger et disponible sur le site Unsplash
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